Entrepreneurs, pensez à vous protéger ! Nul n'est à l'abri d'un accident de la vie...
Entrepreneurs, protégez vous avec les mandats futur/posthume
Afin d'anticiper la prise en charge de vos intérêts patrimoniaux et extrapatrimoniaux, pour le jour où vous ne pourrez plus y pourvoir seul ou pour le jour où vous décèderez, vous pouvez anticiper et recourir à deux types de mandats : le mandat de protection future (art. 477 à 488 du C. civ.) et le mandat à effet posthume (art. 812 à 812-1-4 du C. civ.).
Le mandat de protection future pour le chef d'entreprise
Quel est l'intérêt du mandat de protection future pour l'entrepreneur ?
La vie de l’entreprise suit une temporalité qui peut apparaitre comme étant incompatible avec les délais de mise en place d’une mesure de protection par le juge des tutelles. Ainsi, le mandat de protection future permet à l’entrepreneur, soucieux de la pérennité de son entreprise, de désigner, sans avoir recours au juge et par avance un ou plusieurs mandataires chargés de la gestion de son patrimoine professionnel pour le cas où il ne pourrait plus pourvoir seul à ses intérêts (art. 477 du C. civ.).
Par exemple, le mandat de protection future pourra s’appliquer en cas de troubles cognitifs dus à un AVC ou à la maladie d’Alzheimer et empêchant la personne de pourvoir seule à ses propres intérêts.
Quelle est la forme à privilégier lorsque le mandat de protection future porte sur la gestion de biens professionnels ?
Le mandat de protection future peut être établi sous deux formes :
- par acte notarié
- par acte sous signature privée, avec l’aide d’un avocat par exemple (art. 477 al. 4 du C. civ.).
La forme notariée du mandat est recommandée car seul l'acte authentique permet de conférer des pouvoirs élargis au mandataire (art. 490 du C. civ.), tout en prévoyant un contrôle de celui-ci par le notaire (art. 491 du C. civ.).
En effet, la continuité de l’entreprise requiert parfois l’établissement d’actes de disposition tels que la vente d’élément d’exploitation ou encore le renouvellement d’un bail commercial.
Or, seul le mandat de protection future par acte authentique permet d’atteindre ces objectifs ainsi que de bénéficier des conseils du notaire quant à une rédaction sur-mesure du contenu du mandat.
Le chef d’entreprise pourra ainsi prévoir dans la rédaction du mandat que le mandataire prend sa place dans la vie de l’entreprise (gestion de la société, présence et droit de vote aux assemblées…). Le mandat peut aussi prévoir des contrepouvoirs à la gestion de l’entreprise par le mandant.
De même, le mandat peut prévoir, bien qu’elle ne soit pas obligatoire, une rémunération pour le mandataire (art. 419 al. 5 du C. civ.).
Le mandat à effet posthume pour le chef d'entreprise
Quel est l’intérêt du mandat à effet posthume pour l’entrepreneur ?
Le mandat à effet posthume est entré en vigueur le 1er juillet 2007. En l’instaurant, le législateur a accédé à une demande forte issue du monde notarial. Le mandat à effet posthume, permet à une personne avant son décès de désigner un mandataire qui, à compter de l’ouverture de sa succession, se chargera de l’administration et/ou de la gestion de tout ou partie de ses biens à la place de ses héritiers (art. 812 et suivants du C. civ.).
Par conséquent, il permet au chef d’entreprise de désigner de son vivant la personne idoine pour gérer son entreprise à son décès et éviter ainsi la paralysie de la vie de l’entreprise.
Quelle forme le mandat à effet posthume doit-il revêtir ?
Le mandat à effet posthume doit obligatoirement être dressé en la forme authentique (art. 812-1-1 al. 3 du C. civ.). Cela signifie qu’il doit être rédigé par un notaire.
Quelles sont les conditions du mandat à effet posthume ?
Aux termes de l’article 812-1-1 du Code civil « Le mandat n’est valable que s’il est justifié par un intérêt sérieux et légitime au regard de la personne de l’héritier ou du patrimoine successoral, précisément motivé ». Par exemple, le mandant peut décider de nommer un ami pour gérer sa société jusqu’à la majorité de ses enfants héritiers et mineurs.
Le mandataire peut être une personne physique, y compris un héritier (art. 812 al. 2 du C. civ.), ou une personne morale comme une société. Il doit jouir de sa pleine capacité civile et ne pas être frappé d'une interdiction de gérer lorsque des biens professionnels sont concernés (art. 812 al. 3 du C. civ.).
Le chef d’entreprise désigne de son vivant la personne qu’il estime la plus à même de gérer son entreprise en cas de décès.
Le mandat est donné pour deux ans voire cinq ans, en raison de l’inaptitude, de l’âge des héritiers, ou de la nécessité de gérer des biens professionnels. Il peut être prorogé par décision judiciaire (art. 812-1-1 al. 2 du C. civ.).
Quel est le rôle du mandataire posthume ?
Le mandataire posthume désigné par le chef d’entreprise doit agir pour le compte et dans l’intérêt du ou de plusieurs héritiers identifiés (art. 812 al. 1er du C. civ.). Ainsi, il représente les héritiers et gère l’entreprise pour leur compte. Tant que les héritiers n’ont pas accepté la succession, le mandataire peut uniquement faire des actes conservatoires ou de surveillance (art. 812-1-3 du C. civ.). Ensuite, il bénéficie de pouvoirs étendus tels que prévus dans le mandat.
Si l’entreprise est exploitée sous la forme individuelle, le mandataire aura en charge son exploitation. Si l’entreprise est une société, le mandataire exerce les prérogatives d’un associé. Le mandat peut aussi prévoir que le mandataire reprend la direction de la société.
Attention, le mandataire n’est pas tenu aux dettes de l’entreprise ; ce sont les héritiers qui les supportent. Aussi, ces derniers sont imposables en leur nom.
Le mandataire peut être rémunéré seulement si le mandat à effet posthume le prévoit (art. 812-2 du C. civ.).
Chaque année et en fin de mandat, il rend compte de sa gestion aux héritiers et les informe des actes accomplis (art. 812-7 du C. civ.).
La responsabilité du mandataire peut être recherchée en cas de faute.
Le mandat prend fin pour l’une des causes prévues à l’article 812-4 du Code civil : l’arrivée du terme, la renonciation du mandataire, la révocation judiciaire, la conclusion du mandat conventionnel entre les héritiers et le mandataire, l’aliénation par les héritiers des biens objet du mandat, le décès ou la mise sous mesure de protection du mandataire et le décès de l’héritier ou la décision du juge des tutelles mettant fin au mandat.
MARS 2024